Objectif Patrimoine

Lettre Conseil MMA Vie - Novembre 2022

Comment protéger mon conjoint, concubin ou compagnon, si je venais à disparaître ? Ce que la loi permet.

Au sein du couple, il peut exister un déséquilibre patrimonial issu des parcours individuels et des transmissions reçues, parfois accentué par les choix de vie : temps partiel, congé parental etc. Comment organiser la structure civile et financière du patrimoine pour protéger en cas de décès le conjoint ou concubin survivant, notamment quand ses revenus et son patrimoine sont plus faibles ?

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Pacs, mariage : la première des protections du couple en cas de décès

Si ce n’est déjà fait, la première des protections est d’établir un lien juridique au sein du couple, que ce soit par un contrat de Pacs ou plus sécuritaire, de mariage.
En effet, la loi ne régit pas les liens patrimoniaux entre les concubins qui restent juridiquement des étrangers l’un à l’autre, que ce soit de leur vivant ou en cas de décès.

Signer un Pacte civil de solidarité (Pacs), le premier niveau de protection

Le Pacs permet aux partenaires, sauf aménagement conventionnel, de gérer leur patrimoine dans le cadre d’un régime de séparation de biens. Chaque partenaire reste ainsi propriétaire de ses biens jusqu‘à la dissolution du Pacs. 
Par ce régime par exemple, si l’un des partenaires exerce une activité professionnelle susceptible d’engager ses biens en cas de défaillance, les biens de l’autre ne pourront faire l’objet d’une saisie de la part des créanciers, sauf situation particulière. 

UNE VIGILANCE PARTICULIERE EST A APPORTER EN CAS DE DECES
En effet, bien que le partenaire de Pacs survivant soit exonéré de droits de succession en cas de décès de son partenaire, il n’est pas héritier et ne dispose que d’un droit temporaire au logement.
Le testament s’avère donc un complément indispensable pour l’attribution de droits successoraux. Ce document doit bien respecter les règles légales de forme et de fonds, comme celles liées à la réserve héréditaire en présence d’enfants. Aussi, il est conseillé de consulter un notaire pour le rédiger.
Le mariage, un mode de protection bien plus complet

Il existe différents régimes matrimoniaux, qui peuvent être conventionnellement complétés, selon les objectifs patrimoniaux et de protection du conjoint survivant souhaités.

À défaut de contrat de mariage, c’est le régime de la communauté réduite aux acquêts qui est appliqué aux époux. Ce régime permet de « mutualiser » au fil de l’eau le patrimoine du foyer, grâce aux biens acquis pendant le mariage. Ainsi, par exemple, si l’un des conjoints a arrêté ou arrête son activité professionnelle pour s’occuper du foyer, il ne sera pas « lésé » en termes de patrimoine.

À l’inverse, le régime de la séparation de biens, régime adopté devant notaire, ne permet pas cette mutualisation. Son adoption est un choix entre les époux afin de conserver une dissociation des patrimoines (ce qui n’empêche pas d’acquérir des biens ensemble, qui seront alors gérés dans le cadre d’une indivision). Mais ce choix est aussi fréquemment dicté par l’activité « à risque »  de l’un des époux pour que ne soit pas mis en risque le patrimoine du conjoint.

Le changement de régime matrimonial pour une meilleure protection

Lorsque les risques et contraintes liées à l’activité professionnelle sont écartés, notamment lors du départ à la retraite, il est possible d’effectuer un changement de régime matrimonial pour un régime plus protecteur.
Le plus souvent, les conjoints optent alors pour le régime de la communauté universelle avec clause d’attribution. Sont ainsi mis en commun pour protéger son conjoint en cas de décès, les patrimoines constitués par chacun au cours de la vie active (sauf exclusion éventuelle des biens donnés et hérités, si une charge d’exclusion de communauté est prévue dans l’acte de donation ou le testament). 
Très protecteur pour le conjoint survivant, ce régime matrimonial peut présenter des désavantages pour les enfants. Aussi, il est primordial d’étudier son adéquation avec sa situation familiale avec un notaire.

QU’EN EST-IL PAR AILLEURS DU REGIME DE LA PARTICIPATION AUX ACQUETS ?

Le régime de la participation aux acquêts est une sorte de compromis : il prévoit en effet une gestion des biens comme en séparation de biens, et l’application des règles de la communauté en cas de dissolution. 
Comme dans un régime de communauté, chaque époux peut, à la liquidation du régime de participation aux acquêts, suite à un divorce ou un décès, profiter de l’enrichissement du patrimoine de l’autre.

Compléter votre contrat de mariage par des avantages matrimoniaux

Protection sur mesure

Dans le cadre de votre contrat de mariage, vous pouvez adjoindre à votre régime matrimonial un ou des avantages permettant d’aménager les règles qui régissent l’organisation de votre patrimoine. Vous obtenez de cette façon une protection « sur-mesure », essentiellement applicable au premier décès de l’un des deux époux. 
Ainsi, trois types de clauses spécifiques permettent de compléter un régime de communauté :

1- La clause de préciput

Cette clause permet au conjoint survivant de prélever sur le patrimoine commun un ou plusieurs biens déterminés, ou une somme d’argent. Elle doit être suffisamment précise pour pouvoir déterminer les biens concernés. 
En pratique, la clause de préciput est souvent mise en place sur la résidence principale (voire la résidence secondaire), ce qui permet au conjoint d’en rester propriétaire en pleine-propriété ; et ceci, sans avoir à rendre des comptes aux enfants qui, en l’absence de cet avantage, auraient pu avoir des droits sur le même bien au règlement de la succession.

A SAVOIR !

Les avantages matrimoniaux ne sont qu’à destination des couples mariés, le Code civil ne les prévoyant par pour les partenaires de Pacs. 
Ils peuvent être adoptés par contrat, avant ou durant le mariage, auprès d’un notaire. Il est à préciser qu’ils ne sont pas considérés comme des donations.

2- La clause de partage inégal

La loi prévoit le principe d’un partage de la communauté par parts égales. La clause de partage inégal permet d’y déroger et de cette façon, de donner une protection supplémentaire à son conjoint. Lors de la succession, il pourra ainsi choisir une quotité supérieure à la moitié du patrimoine composant l’actif successoral qui lui reviendrait normalement. 
Cette clause permet de procéder à un rééquilibre des patrimoines au profit du conjoint survivant qui possède moins de biens propres.

3- La clause d’attribution intégrale au profit du conjoint survivant

Communément retenue par les couples mariés sous le régime de la communauté universelle, cette clause est la plus protectrice, car elle prévoit que l’intégralité du patrimoine commun reviendra au conjoint survivant. Son cadre de vie reste ainsi totalement préservé.

CE QU’IL EST POSSIBLE DE FAIRE DANS LE CADRE DU REGIME DE SEPARATION DE BIENS

Une société d’acquêts portant sur un ou plusieurs biens défini(s) par les époux peut être mise en place. Celle-ci permet un rééquilibrage des patrimoines entre les époux, puisque les biens qui la composent, comme par exemple la résidence principale et son mobilier, sont alors vus comme des biens communs. 
Sauf mention contraire, en cas de cession du ou des biens composant la société d’acquêts, les biens acquis avec les sommes reçues de la vente sont vus aussi comme des biens communs.
A noter : il est aussi possible de mettre en place une clause de préciput sur les biens appartenant à la société d’acquêts. 

Les donations, un excellent outil de protection du couple

Quels que soient le régime et les avantages matrimoniaux adoptés, ils peuvent être complétés par deux types de donations :

La donation de biens

Pour les couples mariés ou pacsés, une donation de biens permet un rééquilibre immédiat des patrimoines, lorsque ces derniers sont disproportionnés. 
Attention toutefois, cette faculté a un caractère irrévocable, c’est-à-dire qu’une fois réalisée, elle est définitive.
 
A savoir : la donation de biens doit également s’exercer dans la limite de la quotité disponible. Une vigilance doit aussi être portée sur l’impact fiscal éventuel (droits de donation au-delà d’un abattement personnel de 80 724 euros ).

La Donation au Dernier Vivant

Pour les couples mariés, une Donation au Dernier Vivant (aussi appelée « DDV » ou donation entre époux) permet de protéger son conjoint en cas de décès. 
Lors de la succession, le conjoint survivant peut retenir l’option de transmission la plus adaptée à sa situation économique et ses éventuels objectifs de transmission aux enfants. 

A noter : dans les familles recomposées, en présence d’enfants issus d’unions différentes, les droits du conjoint survivant sont réduits à la seule possibilité de recevoir un quart de la succession en pleine-propriété. La mise en place d’une Donation au Dernier Vivant est donc importante car elle lui redonne un choix entre les options présentées.

Pour protéger votre concubin ou compagnon, rédigez un testament

La loi vous permet de réaliser des aménagements dans votre succession, selon votre volonté et le respect des dispositions légales, pour protéger ou avantager un bénéficiaire, sans avoir à passer par la donation.

Toujours faire un testament en cas de Pacs ou d’union libre

Les partenaires de Pacs et encore plus les compagnons (union libre) sont très peu protégés en cas de disparition de l’un d’eux, à la différence des personnes mariées : droits sur la résidence principale du couple, droits sur les biens de son compagnon etc.

L’intérêt du testament pour les partenaires de Pacs

En cas de décès, le partenaire de Pacs survivant est exonéré du paiement de droits de mutation à titre gratuit au moment du décès de son partenaire. Toutefois, il est impératif d’avoir rédigé un testament au profit de votre partenaire pour qu’il hérite de vous.

L’intérêt du testament pour le couple en union libre

En cas de décès, le concubin survivant, au regard de la loi, n’existe pas dans la succession. Sans testament entre concubins, ils ne sont pas héritiers l’un de l’autre. La seule solution est le testament : sa rédaction permet d’attribuer tout ou partie ce que l’on appelle la « quotité disponible » de votre patrimoine à votre concubin survivant.

À noter : les concubins ne bénéficient pas de l’avantage fiscal des pacsés et mariés (0% fiscalité) en cas de bénéfice d’un testament. La fiscalité sur votre succession pour votre concubin(e) est de 60% (au-delà d’un abattement de 1 594 euros).

Pour hériter l’un de l’autre, chacun des partenaires de Pacs ou concubins doit rédiger un testament : on parle de testaments croisés. Il peut s’agir d’un testament olographe ou d’un testament authentique.

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